mardi 12 décembre 2006

Tu Flotteu Bin ?


« MAIS TU VAS L’ALLUMER CETTE FOUTUE FUSEE !!! »
« Hey deux secondes babe ». Mes doigts étaient paralysés par le froid et de toute les façons je n’étais pas vraiment sûr d’avoir encore envie de lutter. La terre ne devait pas être bien loin, mais il ne nous restait plus qu’une allumette, le bateau prenait l’eau à vue d’œil et un samedi soir à trois heures du matin les gens devaient certainement être plus occupés à s’enfiler des Caipirinha en scrutant des culs sur de la saloperie de musique cubaine qu’à observer le ciel : nos feux de détresse se confondraient à coup sûr avec les lasers des boîtes de nuit.
Je décidais donc de m’allumer une clope avec la dernière allumette. Je m’étais dit que le fait de fumer une cigarette affirmerait ma position contemplative en faisant comprendre à Julie que je n’avais plus envie d’être secouru, sinon d’observer le lent spectacle de notre propre mort. Je lisais la détresse dans ses yeux et voyais ses bras s’agiter dans tous les sens, mais ne discernais plus le flot d’insultes qui m’était destiné du bruit du vent. Tout ça était complètement abstrait. Je me concentrais sur des détails, comme la taille de ses dents, la façon dont ses yeux mouillés de larmes se plissaient ou encore le mouvement de ses lèvres violettes, et n’arrivais pas à considérer la scène comme un ensemble.




J’avais toujours eu la sensation de flotter. Notre rafiot, lui, était en train de sombrer et l’eau qui portait maintenant mon corps à l’horizontale me permettait de quitter mollement du regard les yeux flippés de Julie pour tourner les miens vers le ciel.

Words : Maciek. Video : Maciek